top of page
  • Cattitudes

Dois-je punir mon chat?

Punir son chat est-ce vraiment utile? Quelles sont les conséquences de la punition? Quelles sont les alternatives pour que mon chat arrête de faire des "bêtises"?


Le printemps arrive, des chatons vont naître, des adoptions vont se faire avec certainement leur lot de surprises, bonnes et parfois moins bonnes... Par « moins bonnes » surprises j'entends que personne n'est à l'abri de petits accidents ou de petites "bêtises", comme se pendre au rideaux, mordiller les fils du téléphone, faire ses besoins hors litière, faire tomber des objets, griffer le canapé préféré de maman...

Alors, sans perdre un instant, vous irez chercher des conseils sur internet pour savoir comment faire cesser ce genre de comportement, trouverez des groupes «spécialisés» sur le chat et par chance, vous trouverez mille et une recommandations données par tout plein de gens bien intentionnés sur les réseaux sociaux. Même certains sites soi-disant « pro » vous expliquerons «Comment bien punir son chat» ( ! ), vous donnant alors l’occasion de légitimer chaque acte punitif que vous infligerez à votre chat.

Passons un peu en revue le genre de « bons conseils » traditionnels que l’on lit souvent :

  • Il faut hausser le ton et de dire « Non! » fermement (en le fixant du regard et en le pointant du doigt)

  • L’enfermer dans une pièce ou dans sa caisse de transport

  • Lui donner un coup de vaporisateur d’eau

  • Lui lancer un objet « non dangereux » dessus

  • Lui mettre le nez dans le pipi

  • Lui donner une fessée avec un magazine ou avec la main

  • Lui donner une tape sur le museau

  • Le secouer par la peau du cou (« comme sa maman-chat »…)

  • Le jeter au travers de la pièce…

Et pourtant… Malgré tout cet arsenal de « bons conseils » pour que le chat comprenne que « c’est mal », il a pourtant recommencé, encore et encore… et de plus en plus en votre absence ! Que va-t-on alors pouvoir ajouter à ce package déjà bien rempli ? Le jeter par le balcon ?

Autant être clair tout de suite : il n’y a pas de bonne punition, ni de bonne manière de punir ! Et c’est bien pour cette raison que les punitions vont souvent crescendo sans pour autant que le problème ne soit réglé.


Pourquoi la punition n’est pas la bonne solution?




Avant tout, pour le chat, la notion de "bêtise" n'existe pas ! Tout comme les concepts de « bien » et le « mal », les notions de « bêtise » et de « punition » sont exclusivement humaines, culturelles et sociales apprises au cours de notre éducation. Elles sont étrangères au chat qui n'a donc pas conscience de faire une bêtise. De son point de vue, il émet juste un comportement, interagit avec son environnement ou parfois essaie de s'occuper, c'est tout ! Le chat agit selon ses instincts, son état émotionnel, ses besoins, ses envies (voire exprime un mal-être), d’autant plus si c’est un chaton, avec toute l'énergie qui caractérise la période juvénile, qui a besoin de beaucoup explorer et de faire de nombreux apprentissages pour bien grandir. Penser que le chat « sait » qu’il a fait quelque chose de mal et qu’il va comprendre le sens de la punition est ce qu’on appelle un anthropomorphisme : l’anthropomorphisme consiste à attribuer aux animaux des réactions et des sentiments propres à l’espèce humaine. Par exemple, certains croient que leur chat ressent de la culpabilité s’il se fait gronder après avoir fait quelque chose qui lui est interdit ou encore qu’il agit par vengeance. Or c’est faux. Il s’agit là d’une mauvaise interprétation qui va grandement nuire à la résolution du « problème » : en attribuant des émotions et des raisonnements proprement humains aux chats, on va tenter de gérer le « problème » comme on le ferait avec un enfant. Sauf qu'à l’enfant, qui parle le même langage que nous, on lui explique pourquoi son comportement n’est pas acceptable.


Les actions qui suivent un comportement dérangeant sont dès lors totalement inappropriées. En plus de ne pas respecter la nature du chat, cela va mener à encore plus de difficultés de cohabitation. Et oui, car pour le chat toute punition quelle qu’elle soit n’a aucun sens ! Tous ces actes punitifs ne sont pour lui ni plus ni moins que des agressions. L’incompréhension doublée de l’agression subie va induire peur et stress. Et s’il accumule trop de stress, trop de tensions, il va devoir l’évacuer à un moment ou un autre par… des comportements gênants (pipi sur le lit, léchage excessif, griffades, etc., voire agressions contre la personne qui lui a fait subir ces actes punitifs) ! On entre alors dans un cercle vicieux de la violence :

De plus, non seulement votre chat n’aura toujours pas compris/appris que ce qu’il a fait est dérangeant pour vous, mais il aura appris à vous craindre : il comprendra seulement qu’il ne peut pas faire confiance à l'environnement où vous vous trouvez à ce moment-là. Il associera votre présence à un moment stressant. Il VOUS aura associé à la conséquence désagréable d’un de ses comportements, mais non pas à son comportement en lui-même !

In fine, la punition ne fait qu’augmenter considérablement le niveau danxiété du chat et provoque souvent une peur de la personne qui punit, tout en développant une crainte de certaines situations. Elle dégrade la confiance que le chat éprouve pour l’humain et l’en éloigne.

A ce stade, il n’est pas difficile de comprendre que la punition est injuste, contre-productive et inefficace !


Les idées reçues et anthropomorphismes concernant la punition


J’ai par exemple lu textuellement ce passage sur la punition :

« Ne le punissez que si vous le prenez sur le fait sinon il ne comprendra pas et cela pourra le déstabiliser. Pour lui faire comprendre que ce qu'il a fait n'est pas bien, vous pouvez lui infliger les mêmes types de punitions que celles que sa mère lui administrait. Par exemple une petite tape du bout du doigt, de façon répétée et rapide, pendant quelques secondes, sur la tête ou sur l'arête du nez. Vous pouvez aussi siffler et cracher comme un chat en colère, il comprendra alors que vous n'êtes pas contents. Ou bien, vous pouvez lui pulvériser un peu d'eau sur le dos à l'aide d'un vaporisateur ou d'un petit pistolet (attention à ce que le jet ne lui fasse pas mal). »

Ce passage, empreint de tout plein de bienveillance (je ne doute pas que cette personne, professionnelle dans le domaine l’élevage félin, est bien intentionnée et veille au bien-être de ses animaux) est truffé de fausses croyances et d’anthropomorphismes! C'est malheureusement le lot de beaucoup de personnes qui pensent agir en toute bonne foi...


Voyons ensemble quelques-unes de ces idées trop bien ancrées dans l'esprit de tout un chacun :

  • « Il sait très bien qu’il a fait une bêtise ! »

Erreur d’interprétation ! Comme nous l’avons vu précédemment, le chat ne sait pas qu’il a fait une bêtise, puisqu’il agit selon ses instincts, son état émotionnel, ses besoins, ses envies. Le chat sait juste que vous êtes en colère et que les prochains instants risquent d’être désagréables pour lui, ça lui suffit pour s’enfuir ! En revanche, il n’a aucune idée de pourquoi vous êtes en colère, et connaît encore moins les notions de culpabilité ou de vengeance. C’est de l’anthropomorphisme que de lui prêter de telles notions humaines. Une expérience éthologique récente (A. Horowitz, 2009, Behavioural Processes) l’a même démontré sur les chiens (à défaut d’en avoir une sur les chats) : l’animal réagit à la réaction de l’humain (colère ou bienveillance), peu importe ce qu’il a fait avant (bêtise ou pas).

  • « Prenez-le sur le fait et il comprendra ! »

Alors oui, le chat peut très bien apprendre via un stimulus négatif = le punir ou lui faire peur par exemple. Mais l’apprentissage est de mauvaise qualité : le chat cherchera quand-même à réaliser ses besoins comportementaux, mais il le fera dans un contexte anxieux vis-à-vis de l’humain. Et c’est souvent ce qui est frustrant : non seulement il continue de faire la bêtise dès qu’on est absent, mais en plus il se met à avoir peur quand on arrive, ne comprenant pas pourquoi il se fait gronder. Il devient méfiant à tout moment.

  • « Il faut faire comme la maman-chat, le prendre par la peau du cou »



Cette idée a la vie dure ! En aucun cas la maman chat utilise ce geste pour punir ses chatons !!! Jamais ! Les deux seules situations où la maman chat prend ses petits par la peau du cou sont :

- Si un très jeune chaton s’éloigne trop de sa mère, il paniquera et miaulera. La maman chat réagira à son appel et le prendra par la peau du cou (sans planter ses dents) pour le ramener au nid tout en douceur.

- La chatte pense que la litière et les chatons sont en danger. Elle ramasse ses petits un par un et les déplace vers un endroit plus sûr. Elle fait cela jusqu’à ce qu’ils soient trop gros pour pouvoir les déplacer.

Rappelons donc qu’elle le fait lorsque les chatons ne pèsent que quelques centaines de grammes maximum ! L’impact est donc bien différent quand on attrape à pleine main son matou qui fait 4 kg . Soulever un chat adulte par la peau de la nuque est extrêmement douloureux pour l’animal. C’est une forme de punition très désagréable que le chat ne comprendra pas plus qu’une autre forme de punition. Si vous faites cela souvent, votre chat pourra développer une peur de vous, de votre contact physique et/ou de la manière dont vous allez le soulever de manière générale.

  • « Une petite tape avec un journal, un peu de vaporisateur d’eau, ça ne fait pas mal ! »

Dans la tête des gens, le vaporisateur d’eau ou la « petite » tape sont des façons d’augmenter l’intensité de la punition de façon parfaitement acceptable lorsque la réprimande verbale échoue, car cela « ne fait pas mal » au chat.

Comme nous ne punissons pas nous-mêmes l’animal physiquement, nous pensons que le chat ne fait pas la relation entre nous et l’objet punitif. Eh bien détrompez-vous! Le chat ne s’est jamais fait poursuivre par le vaporisateur d’eau en votre absence et il comprend parfaitement que c’est vous qui le punissez. À ses yeux, vous devenez donc désagréable. La seule chose qu’il comprendra, c’est qu’il a intérêt à ne pas monter sur la table quand vous et le vaporisateur d’eau êtes dans les parages. C’est tout. Et non seulement il ne comprendra pas pourquoi il est puni, il deviendra aussi de plus en plus stressé. Et de cette confusion anxiogène découle souvent d’autres problèmes de comportement.


Vous comprenez donc pourquoi la punition, qu’elle soit infligée par un vaporisateur d’eau, de façon verbale ou physique, est une stratégie très inefficace. Elle équivaut à exprimer tout ce que vous ne voulez pas, sans pour autant formuler clairement au chat ce que vous voulez.

Les théories de l’apprentissage ont fortement évolué depuis ces deux dernières décennies et ces méthodes, issues d’anciennes façons de "dresser" un animal (principalement les chiens), sont maintenant dépassées. Les chats sont de plus beaucoup moins résilients à la punition que les chiens et ne s’y conforment pas aussi facilement. La réaction du chat à l’égard de la punition est simple : « Tu es désagréable, et si tu l’es trop souvent je vais t’éviter ou devenir agressif ».


Mais alors, que faire quand mon chat fait une « bêtise » ?

Plusieurs points sont à aborder pour une bonne cohabitation chat-humain :


1. Les besoins naturels du chat


Comme nous l’avons vu précédemment, chaque comportement que le chat exprime est la conséquence d’une envie, d’un besoin (ou d’un mal-être). Il est par exemple naturel pour un chat de grimper, de griffer des surfaces, d’explorer son environnement ou de chasser.

Il est important d’accepter que lorsque l’on adopte un chat, cela va de pair avec l’aménagement d’un environnement adapté à ses besoins. C’est-à-dire ? Un environnement stimulant, bien organisé. Une bonne gestion de la nourriture, une litière adaptée à ses besoins (bac ouvert, litière non parfumée, sans javel et autres idées farfelues trouvées sur internet), des griffoirs, des espaces en hauteur et près des fenêtres, d’autres pour qu’il puisse s’isoler, des jouets, et bien-sûr de l’attention et des caresses !

Si sa nature féline, ses vrais besoins sont respectés, il n’aura a priori aucune raison de faire « ce qu’il ne doit pas faire ».


2. La gestion de l’environnement


Ici, on agit sur le lieu-dit de la « bêtise » et/ou son environnement ! Par exemple, si votre chat s’acharne à griffer votre canapé, pensez à utiliser du scotch double-face à l’endroit même où il fait ses griffes. Le lieu rendu désagréable pour ses petites pattes, il sera vite motivé d’aller les faire ailleurs. Oui, mais où ailleurs ??? Justement, vous pourrez le rediriger sur les griffoirs que vous aurez mis en place, dont l’un se trouvera justement accolé à l’endroit où il avait l’habitude de faire ses griffes.

Autre situation : si par exemple votre chat fait tomber régulièrement des objets de vos commodes ou étagères, à vous de faire en sorte que ces objets soient inaccessibles pour le chat (en bloquant l’accès) ou alors en n’y laissant rien de dommage ou de fragile !


3. La redirection du comportement


Chercher à dissuader un comportement naturel et instinctif est vain. On va alors plutôt montrer clairement au chat ce qu’on attend de lui. Depuis qu’on a découvert les méthodes d’apprentissage par le renforcement positif, on s’est aperçu qu’il est possible d’entraîner des comportements à un animal (toutes espèces confondues) sans le punir. Le principe du renforcement positif est d’apprendre à l’animal à faire des comportements qui lui rapportent quelque chose d’agréable comme une friandise, une caresse ou une séance de jeu. Le renforcement positif est donc la solution parfaite pour le chat. En trouvant une solution de rechange acceptable pour vous et en montrant au chat quel comportement vous aimeriez qu’il adopte au lieu de punir celui qui vous dérange, votre chat comprendra plus rapidement. Voyant que c’est beaucoup plus payant, grâce aux récompenses, votre chat adoptera très rapidement ce nouveau comportement alternatif et il attendra sa récompense de plus en plus longtemps. (Il faut évidemment y aller graduellement).

Pour reprendre l’exemple précédent du canapé et du griffoir, à chaque fois que votre chat se dirigera vers l’angle du canapé, vous laisserez le chat constater que c’est désagréable (le scotch double-face) et l’inviterez (en le leurrant d’une friandise au début) à griffer sur le griffoir qui est tout proche. Cela peut également se faire à l’aide du clicker training qui est plus efficace sur le long terme.

En étant dans le bon timing et en répétant régulièrement ces actions, votre chat comprendra vite qu’il y a un comportement qui lui amène quelque chose d’agréable, alors que le même comportement ailleurs ne lui rapporte rien. Le principal pour lui étant de se satisfaire, il discriminera vite quel est le bon comportement à renouveler (celui du griffoir). Et cela peut fonctionner pour à peu près tout !




En conclusion


Vous aurez bien compris qu’en plus de ne pas fonctionner, la punition peut altérer profondément la relation agréable et positive qui existe avec votre chat. Tout ce qu’il sait, c’est que quand vous avez tel ton de voix, telle façon de marcher, de bouger, cela annonce quelque chose de mauvais pour lui et cela peut briser le lien de confiance qui existe entre lui et vous.

Lorsque votre chat présente un comportement qui ne vous convient pas, il sera toujours plus efficace de chercher à comprendre la motivation de votre chat à exprimer un tel comportement et de détourner ce besoin sur une alternative qui vous conviendra à tous les deux. En réaménageant et en enrichissant l’environnement, et en récompensant les comportements qui vous conviennent à vous et à votre chat, il les fera finalement de lui-même et aura plaisir à les exprimer.


Je suis consciente qu’il est parfois plus facile de théoriser les situations que de les appliquer dans son quotidien. N’hésitez donc pas à me contacter si vous désirez de l’aide dans votre démarche et votre envie d’améliorer la situation avec votre petit félin. Je me ferai un plaisir de vous accompagner.




bottom of page